94 % des crédits de carbone n'auraient pas d’effet bénéfique pour le climat selon The Guardian


Le 23.01.2023

Les projets d'élimination du CO2 sont actuellement largement insuffisants pour atteindre les objectifs climatiques internationaux, qui vont nécessiter le développement massif et rapide de technologies innovantes, concluent des scientifiques dans le premier bilan global réalisé sur le sujet.
Deux quotidiens européens, "The Guardian" et "Die Zeit", révèlent suite à une enquête qu'une écrasante majorité des crédits carbone certifiés par l'organisme de certification Verra sont des "crédits fantômes ». Un réel problème pour l’objectif de neutralité de carbone qui freine l’avancée.

La majorité des crédits carbone «ne valent rien», selon une enquête

Qu’est-ce qu’un crédit carbone et à quoi sert-il ?

L'idée de créer des crédits carbone est apparue à la fin des années 1990. Durant cette période, la plupart des pays mettaient en place le protocole de Kyoto, le premier traité mondial sur le changement climatique. Depuis celui-ci, tous les porteurs de projet de réduction d’émissions de gaz à effet de serre, peuvent recevoir des “crédits carbone“ à condition de respecter certaines exigences.
Un crédit carbone fonctionne comme un certificat. Il atteste que le projet a bien évité ou empêché une tonne de dioxyde de carbone équivalent (tCO2e). La compensation ou la contribution carbone consiste à financer, via l'achat de crédits carbone, un projet dont la mise en œuvre permet de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Chaque tonne de CO2 évitée sur ce projet correspond à un crédit carbone.
Pour générer un “crédit carbone“, il faut par exemple qu’une partie de forêt tropicale, menacée par la déforestation et ne soit finalement pas abattue. La superficie de forêt ainsi “sauvée“ correspond à un certain volume de carbone, qui pourra ensuite continuer à être absorbé par les arbres. Les entreprises peuvent ensuite acheter des crédits équivalent à ces volumes absorbés de CO2 pour annuler leur propre impact climatique, par une simple transaction financière.
Le prix d’un crédit carbone dépend surtout des subjacents du projet écologique. Son prix est souvent compris entre 50 centimes et 50 euros la tonne d’équivalent CO2. ll existe aujourd’hui plusieurs mécanismes pour attribuer un prix à une tonne d’équivalent CO2, notamment :

- une taxe carbone portant sur les émissions
- la mise en place d’un marché du carbone, au sein duquel ils peuvent s’échanger des droits à polluer

Des «erreurs massives de calcul», rétorque Verra

Tiré par l’ONG états-unienne Verra, créée en 2007 et qui revendique avoir certifié plus de 1 500 projets avec son Verified Carbon Standard (ou VCS), un marché de crédits carbone vérifiés s’est lancé. Il permet aux entreprises d’atteindre leurs objectifs de neutralité carbone.
Problème : la validité de ces crédits est régulièrement remise en cause pour des questions de méthodologique.
L’ONG américaine Verra, qui représentent 40% de ses crédits approuvés et vendus, seraient “fantômes“ et n’auraient pas dû être approuvés. Pire, ils pourraient même aggraver le réchauffement climatique. Pour arriver à cette conclusion, les journalistes ont analysé les résultats de trois études scientifiques ayant utilisé des images satellites dans l'obejctif de vérifier les résultats de projets de compensation forestière, connus sous le nom de programmes Redd+.
Le premier exemple est celui sur 40 projets qui ont été certifiés par l’organisme de certification Verra. Cependant, il a été révélé que dans 32 de ces projets, les scénarios utilisés par Verra surestimaient la perte de forêt évitée d’environ 400% en moyenne. Bien qu’un certain nombre d’entre eux aient permis d’éviter la déforestation, les superficies concernées étaient extrêmement faibles. Ce qui a impliqué un effet bénéfique pour le réchauffement climatique bien moindre qu’annoncé.

Si l’on exclut trois projets à Madagascar ayant obtenu d'excellents résultats, la surévaluation serait même d’environ 950%, selon une étude menée par une équipe de l'université de Cambridge sur 40 projets Verra.
Le second concerne 29 projets approuvés par Verra et pour lesquels une analyse plus approfondie était possible, en effet 21 n'avaient aucun avantage pour le climat. Sur les huit projets qui présentaient des preuves de réductions significatives de la déforestation, sept d’entre eux avaient entre 98% et 52% d'impact en moins que ce qu'affirmait le système de l’ONG américaine, et un seul affichait 80% d'impact en plus.

Pour cause : les scénarios de base de la perte de forêts qui seraient surévalués d'environ 400%.

Attention au greenwashing (involontaire) des crédits carbone

Le secteur des compensations carbone représente environ 2 milliards de dollars. On apprend même que c’est la méthode principale des grandes entreprises pour clamer qu'elles sont neutres en carbone, alors que leur activité génère bien du CO2.
Planter des arbres ne va pas suffire à compenser les émissions carbone résiduelles des organisations, une fois tous les leviers de sobriété, de changement de process et de passage aux énergies renouvelables activés.
Mais la quasi-totalité des certificats de Verra sont "probablement" des "crédits fantômes" et "ne représentent pas de réductions réelles des émissions", selon The Guardian, qui a répondu sur son site internet que les études sur lesquelles se sont basés les médias comportaient des "erreurs massives de calcul“.
On connaissait déjà les limites de la compensation carbone, mécanisme qui vise à financer des projets favorables au climat tout en continuant des activités polluantes.
Pour conclure, toutes les raisons sont bonnes pour atteindre la neutralité carbone, soit l'objectif de nombreuses entreprises qui restent malheureusement trop mal informées.

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